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Lettres pour guérir...
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Bonjour, je fais un travail en ce moment avec une psychothérapeute, elle m’a invité à envoyer ce témoignage à une association contre les victimes de toutes sortes d’abus sur les enfants.
  J’ai écris une lettre à cet ami que je n’ai jamais retrouvé, encore maintenant je souffre de n’avoir pu lui dire ce que j’avais sur le cœur.
La seconde lettre est destinée à l’enfant brisé en moi, pour me rassurer et me déculpabiliser.
Je veux clore ce passé, et enfin aller de l’avant. Merci pour l’occasion que vous donnez aux victimes quelles qu’elles soient, de s'exprimer.  
 
  • Mon très cher Charles, mon ami, mon frère d'internat. Cela fait 32 ans que je voulais te dire ce que j'ai sur le cœur depuis tant d'années. Je te demande pardon. Pour ce que je n'ai pas réussi à faire à l'époque pour toi. A l'école, à l'internat.

Quand l'heure de l'extinction des lumières venait, j'entendais le surveillant faire sa ronde parmi les box de l'internat. Tard, dans la nuit, il se passait des choses.  Je ne savais pas, je ne comprenais pas réellement ce qui arrivait à certains enfants. Jusqu'à ce qu'une nuit, je monte sur un des lits gigognes, pour mieux entendre d'où provenait le bruit de ces pas et de froissement d'habits que j'entendais. Une voix d'homme se voulait apaisante en susurrant des mots incompréhensibles en réponse aux suppliques d'un de mes camarades. C'était ta voix,  Charles. Toi, qu'ils appelaient "Nutella". D'ailleurs à cette époque je ne comprenais pas quelle était l'origine de ce surnom saugrenu. Il aura fallu l'apprendre de par ta bouche, quand une fois, je t'avais "traité" par ce sobriquet malheureux. - "Non, pas toi!!! Ne m'appelle pas comme ça!! C'est raciste!!!" Je n'avais pas bien compris pourquoi ce surnom te révulsait à ce point. Je ne savais pas encore la définition de ce mot barbare et guttural : "raciste". Je n'avais pas saisi l'insidieuse connotation méchante derrière ce patronyme que j'aimais. Le goût du Nutella était assimilé, pour ma part, à quelque chose d'agréable, de gourmand, de délicieux, qui n'avait pas de sens à proprement parlé avec sa couleur... Je suis désolé Charles, je ne savais pas, mes parents ne m'avaient jamais inculqué de valeurs racistes. J'aurais voulu te le dire sur le moment, tout ça, mais peu de temps après cette effroyable expérience, tu avais disparu, tes parents t'avaient enlever de cette école maudite, qui détruisait l'âme de certains garçons, et leur corps, à tout jamais. J'aurais voulu intervenir, mais j'avais tellement peur, j'étais paralysé et me recroquevillais dans mon lit. J'entendais ta voix aux accents de douleurs et de pleurs, à moitié étouffée par la main de ton bourreau. Pour te faire taire, il te frappait avec sa ceinture, car j'entendais le claquement, tel un fouet s'abattre sur toi. J'avais tellement peur, et pourtant, j'essayais de prendre mon courage à deux mains, de me lever pour aller lui casser la gueule à cette espèce d'enfoiré de merde!!! Je m'en suis tellement voulu pendant des décennies, il n'y a que depuis peu  que j'ai trouvé la paix, la force de me pardonner pour mon inaction. Je m'étais même raconté une histoire, celle où j'intervenais, où je te sauvais de l'inimaginable calvaire. J'avais besoin de croire en mon histoire pour étouffer cette honte, Ma honte, de n'avoir rien fait!! Je n'avais pas dix ans, si j'étais intervenu, je serais devenu moi aussi une victime de viol, une victime d'une sale race de pédophile qui venait chercher leurs proies jusque dans leurs lits, la nuit, dans un internat d'une école pour enfant artiste.  Tu implorais, tu te débattais, sans que personne ne vienne à ton secours. Ta voix, je ne l'oublierai jamais... Ces bruits atroces et dégoûtants non plus. Le tintement de ceinture, le bruit des vêtements et des draps chiffonnés. C'est à ce moment-là que mon oreiller est devenu une nécessité... Chaque soir, chaque nuit, ne sachant pas ce qu'il pouvait advenir, je me le mettais sur la tête pour ne pas entendre encore les gémissements qui partaient de certains box.  Voilà pourquoi je souffrais d'insomnie dès l'enfance. Voilà comment je ne supportais plus l'injustice faite à mes camarades. J'étais de tous les combats depuis lors. Voulant me protéger moi-même inconsciemment de ces prédateurs sexuels, je prenais le parti d'être le porte drapeau de chaque revendication des élèves, et ce, même à tort parfois. Mais tant pis, il fallait bien que quelqu'un nous protège ...
Charles, je tenais à te dire que je suis vraiment désolé, j'espère que tu ne m'en veux pas, que tu ne m'en veux plus ? Toutes ces années à être persuadé que c'était moi le salaud. Je te demande pardon. Tu sais, quelques années plus tard, d'autres victimes se sont mis à parler. A venir, vers moi, à m'avouer très difficilement ce qu'ils avaient subi, et ce qu'ils subissaient encore pour certains!! Oui, encore!! Cela a duré des années, des siècles, une éternité de malheur. J'étais plus grand, un jeune adulte de dix huit ans, lorsque Paul m'a tout raconté. Avec des détails à faire vomir. J'avais envie de les tuer , ces immondes porcs!! C'était insupportable!! Cela a pris du temps, mais j'ai réussi à l'emmener chez les gendarmes, mon ami. Paul a porté plainte. La conséquence de tout ça, c'est que d'autres petites victimes ont eu le courage, eux aussi, de porter plainte!! Tous ces salopards ont été arrêtés!! Un vrai réseau de pédophiles, tu comprends Charles ? J'ai même témoigné deux ans après, au tribunal de Nice, où je me souviendrai toujours du visage des familles des victimes, et celles des prévenus. Tant de vies ont été foutues en l'air.  Je me dis que le "tien" a dû être emprisonné, lui aussi, dans le tas. Je l'espère du moins, je n'en suis pas sûr...cette histoire m'anéantissait, il fallait que je prenne du recul, je n'ai pas su le nom de tous ceux qui sont tombés. En tous cas, cela ne m'aurait servi à rien d'apprendre leurs noms, je ne savais pas quel adulte t'avait fait ça.
Charles, j'espère que tu es heureux dans ta vie, j'espère que tu t'en es sorti ? J'espère que tu as pu passer par-dessus tout ça ? Je ne sais pas où tu vis maintenant, je ne sais même pas si tu es encore vivant, moi je suis un peu mort au fond de mon cœur, mais ça va aller, en dehors de ses terribles souvenirs, je n'ai pas été violé. il y en a bien eu un qui a essayé, mais je crois que j'ai eu de la chance ce soir là. Il s'est arrêté au fait de me toucher. Puis il est parti en me demandant si ça m'avait plu. C'était un des "nôtres", un grand des classes supérieures, je devais être son "premier"... A moins que ce ne soient mes yeux qui lui aient fait peur ? Je lui aurais opposé une défense acharnée. Avec le recul je crains qu'il n'ait subi lui aussi une agression sexuelle,  et qu'il voulait peut être "tester" sur un petit ce que "ça" faisait d'être de l'autre côté. En fait j'en suis persuadé maintenant, je ne crois pas qu'il ait fait ça par vice ou par vengeance, il devait souffrir lui aussi, pour en arriver là.  J'ai eu de la chance, oui.
Je vis à la campagne depuis quelques années, dans une petite maison familiale. Le calme de la nature me fait du bien. Je suis bien marié, avec une femme magnifique, elle m'a donné  un fils, beau comme le soleil, sa voix est douce, c'est un bon garçon, il est droit et généreux, il dessine merveilleusement. Il m'aime.  Je suis devenu un artiste, malgré tout. Je chante dans des opéras et je joue au cinéma, je suis heureux. J'ai espoir d'ouvrir un jour, une école de chant pour les enfants, mais sans internat. Si je m'en suis sorti, c'est grâce au chant, j'aimerais donner aux enfants, ce bel outil qu'est la musique, celle qui fait que les situations les plus difficiles deviennent moins dures à vivre, et aide à exprimer les états d'âme.
Charles, j'espère que tu comprendras ma démarche ? J'avais besoin de te dire tout ça, parce que ça pourrissait au fond de moi.
Adieu, mon très cher Charles, mon ami, mon frère d'internat.  Il y en avait au moins un qui ne savait pas pourquoi on t'appelait Nutella. Il y en avait au moins un, qui voulait te sauver.
B...
 
 
 
 
           .Ecoute mon Pitchoun, j'aimerais te dire quelque chose de beau.
Je sais ce que tu as vécu là-bas. Je sais tes larmes, tes peurs et tes nuits de misères. D'abord, je voudrais te dire que je t'aime, et que je suis fier de toi. Tu as survécu à tout ça, et ce n'est pas rien tu sais. Je voudrais te prendre dans mes bras pour te donner toute cette affection qui te manquait outrageusement, durant ces trop longues années passées à l'internat. Je voudrais que tu saches que tu n'es plus en danger, qu'il faut cesser de veiller et de voir encore après tant de temps, les fantômes de tes nuits, te hanter au-dessus de ton lit, pour se pencher et te faire craindre le pire.
C'est fini tout ça, c'est fini. C'est le passé. Tous les deux maintenant, on va vivre en n'ayant plus peur.
Je sais à quoi tu penses. Tu penses que tu as failli de nombreuses fois. Surtout celle où tu as entendu Charles appeler, désespérément sans que personne n'intervienne. Ce n'était pas de ta faute, tu le sais. Qu'aurais-tu pu faire ? Te faire agresser toi aussi, te faire taper, et pire encore, devenir le souffre-douleur de ces tarés? La forte tête qu'il aurait fallu briser ? Mais tu étais déjà brisé... Je sais tes pleurs sur la photo de maman, appelant de toute ton âme qu'elle vienne te chercher. Il n'y avait qu'un silence vertigineux qui s'échappait au milieu des nuits de cet internat. Parfois des gémissements et des nez qui reniflaient.
Oui, tu aurais voulu te rebeller encore plus, intervenir pour Charles, mais tu n'avais pas 10 ans mon pitchoun. Vois la force que peut avoir un homme dans ses bras, qu'aurais tu pu faire ? Je sais qu'il n'était pas rare que, pour nous punir, d'un soit disant chahut au moment du coucher, on te faisait te lever avec tes camarades de chambres, descendre les 5 étages de l'école, pour se retrouver dans la cours, à courir durant 30 minutes, en pyjama, dans le froid, en pleine nuit. Tout ça pour calmer les esprits forts... Et tu en redemandais le pire, tu voulais montrer que ça ne te faisait rien, que tu étais indestructible. Alors on te faisait t'agenouiller sur un parpaing et on te mettait une table sur le dos, et on te laissait comme ça pendant toujours trop de temps. Les plus sadiques des surveillants, venaient s’asseoir sur la table, pour peser encore un peu plus sur ton dos et tes genoux meurtris. Tu as pris des punitions pour les autres, avec ton esprit de sacrifice qui t'a collé à la peau jusqu'à maintenant. Mais tu n'aurais pas pu tout prendre sur toi. C'était impossible mon ange, tu n'es pas Dieu!! Tu es juste un enfant qui a besoin d'amour de tendresse. Ce n'était pas ta faute crois moi. Apaise ton cœur, et vois clair en toi-même. Tu le sais, c'était de leurs fautes, à eux, aux adultes, à ces hommes qui vous maltraitaient. Tu n'as pas eu le courage de parler à Charles de ce qui lui était arrivé, mais sérieusement, quels mots aurais tu employé ? Devant l'inénarrable horreur ? Tu t'en veux encore ? Respire, sèche tes larmes, souffle et soulage ton cœur. C'était un adulte qui aurait dû prendre sa défense, votre défense à tous. Pas à toi, mon pitchoun, non, pas à toi.
Tu as été surpris, triste et en même temps soulagé de savoir Charles parti. Oui très étonné qu'au petit matin après le petit-déjeuner, d'un jour ordinaire, ses parents soient venus le chercher, sans que tu le vois. C'est à ta demande qu'on t'a signalé qu'il avait quitté l'école. Tu n'as pas pu lui dire au revoir, c'est aussi ça qui te reste en travers de la gorge. Tu n'as pas pu lui dire que tu étais désolé, et tant d'autres choses encore. Mais toi, tu es resté...Encore, encore, et encore, à crever seul, abandonné, ne te sauvant que par la pratique de la musique et du chant. Alors ne t'en veux plus mon pitchoun, tu as rempli ta part du contrat plus que nécessaire. Tu l'as démontré combien de fois que tu n'étais pas un lâche, un pleutre, un couard ? Tu as fait ce qu'il fallait faire, et tu as survécu. D'ailleurs, je me demande encore comment tu as fait mon pitchoun.... ? Laisse toi aller, viens dans la douceur de mes bras, sans craintes, je suis là. Tu ne seras plus jamais seul, je t'accompagnerai toujours, je te protégerai. Tu es un bon enfant, un petit garçon courageux, pardonnes toi, à toi-même, tu en as fait assez.
Je t'aime.
 B... 

France 3(point)